Il aura fallu 6 ans d’efforts pour faire aboutir la plainte en manquement, déposée et instruite par ALPHALEX-AVOCATS, contre la France.
La représentation par un avocat européen devant les juridictions françaises de dernier ressort est enfin libérée.
C’est un décret n° 2021-171 du 16 février 2021, publié au Journal officiel le 18 février 2021, organisant la représentation devant le Conseil d’Etat et la Cour de cassation de France, par des avocats ressortissants des Etats membres de l’Union européenne, qui libéralise enfin l’accès de ces derniers aux plus hautes juridictions françaises. IL est entré en vigueur le 19 février 2021.
Cet accès est désormais garanti aux avocats ressortissants des Etats membres de l’Union européenne et des Etats parties à l’Accord sur l’Espace économique européen (EEE), qu’il s’agisse des avocats à la Cour ou des avocats habilités à plaider devant les juridictions supérieures, comme les avocat à la Cour de cassation de Belgique.
Rappelons que, en plus de la France, la Belgique et l’Allemagne sont les seuls pays à avoir réservé l’accès à leurs juridictions de dernier ressort à des avocats spécialisés et spécialement formés en ces matières.
C’est donc une véritable révolution qui va modifier fondamentalement les pratiques installées depuis plus de deux siècles au Palais Royal et au Quai de l’Horloge à Paris.
Le décret vise tant la liberté de prestation de services, qui concerne la représentation ponctuelle, que la liberté d’établissement qui suppose un exercice quasi permanent sur le territoire français.
Dans les deux hypothèses, l’avocat européen devra solliciter une autorisation du Garde des Sceaux, et, ce qui s’avère contradictoire avec la liberté d’établissement, faire élection de domicile chez un confrère avocat aux conseils, au motif contestable que cela sécurise les notifications.
En effet, l’avocat européen, établi en France au sens du droit européen ( qui a créé un lien économique effectif avec ce territoire), ne devrait pas être tenu de procéder à une telle élection de domicile, car il s’agit dans cette hypothèse d’une restriction non nécessaire et surtout non proportionnelle à l’exercice de la liberté d’établissement.
Cela étant, cette révolution procédurale est à saluer.
Il aura fallu une plainte, déposée en novembre 2014 et de multiples efforts constants pendant toutes ces années ( la loi MACRON sur la croissance et l’activité a été très utile dans cette perspective), pour que les mesures adoptées par la Commission européenne (mise en demeure, avis motivé) finissent par faire plier l’Etat français.
Il est désormais possible de suivre un dossier jusqu’à son terme sans devoir se dessaisir lorsque l’avocat justifie de sa qualité d’avocat inscrit au barreau d’une arrondissement judiciaire situé sur le territoire d’un Etat membre…qui n’est pas la France.
Paradoxe des discriminations à rebours qui échappent au droit de l’Union européenne, cette révolution ne bénéficiera pas, à tout le moins dans l’immédiat (car c’est un beau combat à mener à l’avenir), aux avocats français qui ne sont pas membres du barreau des avocats au Conseil d’Etat et de la Cour de cassation.